On se réveille un peu – beaucoup – la tête enfarinée. Notre petit asticot qu’on a couché à 1H30 du matin et qu’on n’a pas eu le courage de laisser seul dans le lit à l’étage – dont l’escalier était probablement plus dangereux que le volcan de la veille – a fait le tour du cadran mais pas comme vous l’imaginez puisque il s’est réveillé à 8h30.
Non, le tour du cadran pour Noah consiste plutôt à dormir entre nous et à changer de position toutes les heures via une savante rotation de 30 degrés avant de finir par réussir l’exploit d’opérer un salto arrière et de finir par terre au pied du lit sans même se réveiller.
Du coup on a décidé de s’installer tranquille dans notre petite maison pour 4 nuits (ce qui est assez rare pour être souligné) et se faire une matinée cool. D’abord, on en profite pour découvrir notre petite maison à Seljalandsfoss Horizon. 8 petites maisons de l’autre côté de la route de la fameuse cascade éponyme. Petit mais mignonet, style nordique avec plein de petites idées qu’on prend avec nous pour la Sologne.
Comme il y a une petite cuisine et aucun restau à la ronde, on part faire des courses pour les 3 jours qu’on va passer ici. Direction le Kronan à 15 km de là à Hvolsvöllur, puis retour à la maison où on se fait un petit pique-nique au milieu des hautes herbes en face d’une des cascades secondaires de Seljalandsfoss.
On décolle vers 14h pour ce qui devait être une redécouverte des lieux puisqu’on a arpenté cette zone sud à 3 reprises déjà.
D’abord on profite du temps magnifique pour traverser la route et voir la cascade de 60m de haut de Seljalandsfoss sous un beau soleil qui enflamme, si cela est encore nécessaire, les herbes vert fluo qui tapissent les falaises.
Virginie repart même gentiment à la voiture nous chercher des K-ways pour pouvoir aller derrière la cascade se faire arroser pour le plus grand bonheur du petit… et des grands je dois dire. On finit gentiment dans la gadoue d’ailleurs.
Puis on parcoure 500m à pied pour voir la moins connue Gljufuarfoss que tu n’aperçois qu’une fois être entrée par une anfractuosité de la roche après avoir rencontré le “troll gardien de la cascade” (il doit se réveiller la nuit c’est sûr). Je ne sais pas pourquoi on ne l’avait jamais faite celle-là car elle est vraiment chouette et inattendue.
On reprend la route 1 vers Vik. 20 minutes plus tard, nous voici a Skogafoss. Noah en a profité pour sombrer et on le laisse un peu dormir. Cette cascade est un mystère. C’est un point fort du sud de l’ile et on est persuadé de ne l’avoir jamais faite, ou du moins on est certain de n’être jamais monté tout en haut. Pourtant avec ses 25 mètres de large et ses 62 mètres de hauteur difficile de passer à côté à moins que le temps ait été exécrable et qu’on ait à l’époque fait l’impasse dessus…
On réveille Noah qui est frigorifié d’avoir été tiré de son sommeil et pendant 5 minutes le voilà d’une humeur massacrante.
Mais contre toute attente, arrivés en bas des chutes, il repère l’escalier taillé dans la falaise qui monte pourtant à 65m de haut, et comme une envie de pisser, se met en tête de grimper tout en haut quatre à quatre. On parle quand même d’une hauteur équivalente à un immeuble de 25 étages, et les 50 premières marches mettent tout le monde à bout de souffle car pour une obscure raison, les constructeurs, persuadés en bon nordiques qu’ils sont que seuls des trolls vont se lancer dans cette ascension, font des marches d’au moins 50 cm de haut. Et ce n’est pas du tout une exagération. Noah qui fait déjà 1,14m est obligé de prendre appui avec sa main pour monter chaque marche.
Sauf que là où tout le monde tire la langue et finit par s’arrêter bien pour reprendre son souffle bien avant d’arriver à une hauteur de marche enfin réglementaire, le petit bonhomme, tout en jacassant, avale ces marches, puis les autres et fini en haut sans jamais s’être arrêté, mettant 30m dans la vue à Virginie.
Une fois en haut la vue est magnifique. D’ailleurs on découvre que c’est en fait la fin d’un des très gros trek islandais qui part du Landmanalaugar qu’on ira rejoindre dans quelques jours. Seule ombre au tableau, la mauvaise humeur de Noah qui, sitôt sa performance réalisée, est revenue et il faudra que je pousse une grosse gueulante pour qu’il finisse par rentrer dans le rang et me suive sans moufeter jusqu’en bas. Ouh que je déteste cela, d’élever la voix contre Noah.
Comme on a vraiment pris le temps pour ces 2 cascades, nous voilà confrontés à un dilemme. Il est déjà 16h30. D’un côté on voulait faire une journée repos parce que demain on se lève à 6h15 du matin, de l’autre on avait envie d’aller voir l’épave d’un avion qui s’est écrasé en plein désert.
Or le truc c’est que pour une raison obscure là aussi, alors que la tendance du tourisme mondial est de faire le parking juste en face de l’attraction, là, sans la moindre raison ou logique apparente, il va falloir marcher 3 kilomètres pour rejoindre l’épave. Donc si on fait ça on peut dire adieu au dodo de bonne heure.
Une fois encore, c’est Noah qui imprime le rythme. Il faut dire que maintenant qu’il fait 20 kilos et qu’aucun porte bébé ne peut nous secourir, on rechigne à faire la moindre performance sportive sans un minimum d’approbation ou d’enthousiasme de sa part. Et là, l’épave d’avion, il kiffe grave.
Du coup nous voilà arrivés 15 minutes plus tard au parking du Solheimasandur Plane wreck. Petit aparté. N’imaginez pas une seule seconde que je vous sors les noms islandais de tête.
Bon, on brise le suspense dès maintenant, nous aussi on a kiffé cette découverte insolite pour peu que vous ayez quelques accointances avec Lao Tseu et un certain besoin d‘introspection. Je cite « Il n’y a point de chemin vers le bonheur, le bonheur c’est le chemin ».
Pourquoi ? Parce que pour aller du parking à l’épave d’avion, on va effectivement se cogner à pied 3km de désert entièrement plat sur une piste en terre parfaitement par ailleurs parfaitement empruntable par une voiture s’il n’y avait pas une foutu chaîne à l’entrée pour en interdire l’accès aux véhicules motorisés.
On se retrouve ainsi à marcher dans une immensité monotone sans le moindre repère visuel devant ou sur les côtés nous permettant d’avoir l’impression qu’on est effectivement en train d’avancer et de se rapprocher de notre but.
Noah – et nous aussi d’ailleurs – ne cessons de scruter l’horizon et nous demander où est l’avion. Et pendant près de 2,8 km on en sait fichtre rien, ce qui fait que Virginie qui a embarqué un carnet en papier note scrupuleusement à la demande de Noah tous les indices qui lui passent par la tête pour identifier le chemin qu’on prend et comment repérer cet avion.
Comme il est motivé le bougre, on fait bien 1 des 3 km en courant tellement il est pressé d’aller voir. Faut voir la tête des rares autres personnes qui ont entamé la traversée du désert lorsqu’ils se font doubler par Noah en courant et nous qui cavalons derrière.
Après, ce qui a sans nul doute inspirée celle menant au désert des tartares, la route s’infléchit légèrement et dans une très légère déclivité apparait enfin l’épave de l’avion d’un blanc étincelant.
On n’était que 4 sur place ce qui a renforcé le caractère étrange du lieu. Entrer dans la carlingue posée au milieu de rien c’était irréel et ça l’aurait été beaucoup moins avec un parking à 50m qui en aurait fait une attraction pour car de touristes chinois.
– Quand j’écris ça je ne peux m’empêcher en ce moment de me dire qu’il y a un chinois du bureau politique qui viens de recevoir une alerte sur son ordinateur comme quoi je critiquais la Chine et qui me fiche maintenant comme hostile au régime dans la future invasion chinoise du continent européen. J’en profite donc pour dire que cette remarque anti-chinoise n’est écrite et pensée que par moi et que ni ma compagne ni mon fils ne souscrivent en aucun cas à ces pensées subversives. D’ailleurs Noah se prononce très bien en chinois preuve que je ne suis pas totalement anti-régime –
Maintenant que la curiosité de Noah est satisfaite et qu’il est 17h30 bien tapé, il nous reste les 3 km à refaire dans le même sens. Et là, c’est triplement le désert des tartares qui recommence car non seulement il n’y a plus la curiosité d’aller voir, on sait que cette route n’en finit jamais, mais en plus Noah n’est plus du tout motivé et demande déjà à ce que je le porte alors qu’on est techniquement encore dans la zone de la carlingue.
Lao Tseu, reviens-moi en aide ! « L’expérience est une lanterne qui n’éclaire que le chemin parcouru » me répond-t-il. Foutu Lao Tseu. Ce sera donc un autre philosophe, des temps modernes celui-la, qui me viendra donc en aide. J’ai nommé Georges Lucas.
En effet, pour préserver mon dos d’une longue marche où il serait sur mes épaules, je lui propose de lui raconter l’histoire de Star Wars car à la manière de shérazade dans les mille et une nuits qui tient en haleine le calife en ne finissant jamais l’histoire, je sais que si je lui raconte une histoire de robot, qui plus est celle de StarWars dont son copain Auguste lui a parlé, il va accepter de marcher.
Aussi, quitte à être dans un paysage digne de Mos Eisley, autant lui raconter l’épisode IV et comme Georges Lucas, commencer ainsi la saga par le milieu plutôt que par la fin. Bon j’avoue que pendant les 45 minutes du retour je me suis bien marré à le voir essayer de se rappeler du nom de R2D2, C3PO, Chewbacca, et Luke qu’il passait son temps à appeler Hulk.
Grâce à Starwars, je me suis sauvé en grande partie mon dos et d’un ennui certain (le retour est très long et très chiant), mais en revanche je sens que jusqu’à la fin du séjour, je suis bon pour raconter tous les autres épisodes de la Guerre des étoiles. Etant un peu moins féru que Chonchon sur le sujet, va falloir que je révise…
Une fois de retour à la voiture, je suis fourbu de chez fourbu, genre passé sous le moulinet à poivre. Noah, lui, est plutôt en forme ce qui fait qu’au lieu de rentrer à la maison ce qui aurait été une sage décision, on pousse la chansonnette 20 minutes plus à l’est jusqu’à Dyrholaey qu’on atteint à 19h. Là-bas, il y a une colonie de Puffin en plus d’une belle vue sur la plage de sable noir.
Car si on continue notre journée ainsi, c’est que Noah voulait surtout voir 2 trucs dans le programme du jour. L’avion – ca c’est fait- , mais aussi la plage de sable noir.
Il fait franchement plus frisquet avec le temps qui se couvre depuis que le temps Islandais a repris sur le ciel bleu du début d’après-midi. La plage est visible au loin, mais les puffin très peu nombreux et cachés dans les anfractuosités de la falaise.
On ne s’attarde donc pas trop là pour aller réellement sur la plage elle-même qui se trouve quand même à 15 minutes plus loin en voiture car il faut faire tout le tour de l’estuaire pour l’atteindre. On arrive donc à Reynishverfi à presque 20h et Noah part en courant vers la plage pour rattraper une mariée qui est venue y faire ses photos. Très vite il la délaisse pour la falaise en forme d’orgues qu’il s’empresse d’escalader après avoir vu des gens le faire.
A 20h30 on arrive enfin à décoller et on décide d’aller dîner sur Vik plutôt que de rentrer. L’idée, qui aurait pu être bonne, c’était de le faire manger là-bas, et qu’il s’endormirait dans la voiture et qu’on aurait plus qu’à le poser dans le lit. Vu comme ça, il serait couché à 21h et quelques ce qui pour le réveil de 6h15 demain restait acceptable si on met de côté la dizaine de kilomètres à pied du jour pour sa soi-disant journée de repos.
On arrive à The Soup Company, concept tendance de bar à soupes, avec la soupe maison « lava soup » très bonne au demeurant. Vite servis, et après avoir fait le « tasting menu » de 3 soupes et refill à volonté, on installe effectivement Noah dans le siège auto vers 21h15, sauf qu’au lieu de le voir sombrer comme c’était prévu 30 secondes après avoir démarré, il est captivé par le paysage et finira par faire semblant de ronfler à 3 minutes de l’arrivée en explosant de rire tous les 5 ronflements.
Il est 22h15, on vient de rentrer. Le temps de négocier le coucher, il dort à 23h. Belle journée de repos… Des parents exemplaires à l’écoute de l’enfant et de la satisfaction de ses besoins primaires.
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