Il n’y a vraiment qu’en vacances qu’on est content de se lever à 5h30 du matin. Enfin pour être précis on a eu un premier réveil à 4h15 parce que notre petit ouistiti était frigorifié et est venu se réchauffer dans notre lit. A sa décharge les nuits sont fraîches en Afrique. On dort dans une grande tente ouverte de partout donc il doit faire environ 10 degrés dans la pièce.

On se croirait à Moab lorsqu’au réveil se pose la question de qui va se geler pour aller chercher les fringues des heureux élus qui pourront s’habiller sous la couette. Noah roupille ferme, Virginie dans un élan de générosité se propose d’y aller et de me faire couler la douche. Mais je lui suis reconnaissant un peu trop vite, car avec les problèmes de générateur dans le campement, ils ont coupé l’électricité depuis 21h hier soir et à peine ais-je le temps d’avoir 3 gouttes d’eau chaudes que la douche s’arrête littéralement. Je suis trempé, frigorifié. J’aurai mieux fait de passer mon tour.

10 petites minutes plus tard passées à habiller Noah sous la couette en le faisant rigoler et on est fin prêt pour une petite boisson chaude et faire notre safari matinal. Dehors il fait encore nuit. On se met dans la voiture et comble du luxe, au pilou-pilou de la veille ils ajoutent une petite bouillotte pour chacun que Noah s’empresse de mettre sur son bidou avant qu’on le transforme en bédoin du désert avec la couverture.

Contrairement à hier, on n’a pas fait 5 minutes de voiture qu’on tombe sur une horde de buffles, probablement pas loin d‘une centaine, alors que le soleil n’est pas encore levé. Noah qui compte depuis son arrivée le nombre de fois où il a vu des animaux en est à 39.

Puis rapidement on arrive à 40 avec nos premiers lions. D’abord une première lionne qui fait les 100 pas le long de la clôture électrique qui protège des installations dans la réserve et qui nous passe littéralement sous le nez avant de s’immobiliser un peu plus loin et de scruter quelque chose de l’autre côté de la clôture. Juste derrière, on distingue 3 lionceaux avec une autre lionne. En tout, la horde de ce matin comprendra 4 lionnes et 6 petits. Apparemment ils étaient encore 7 il y a peu mais un lionceau s’est fait tuer par un léopard. Les 2 lions mâles, deux frères, patrouillent le territoire depuis 2 jours d’après Hendrick et manquent à l’appel.

J’en profite pour demander à Hendrick comment ils les repèrent les lions. Ce matin, on a eu de la chance, mais sinon, dans la réserve de Balule qui fait environ 40 000 hectares, il y a 2 zones. Dans notre zone, 6 lodges coopèrent. Sachant qu’une troupe de lions comme celle-ci évolue sur un territoire de 15 à 18 000 hectares, on cherche un peu une aiguille dans une botte de foin. Et encore les lions se repèrent plus facilement, mais pour le léopard d’hier qui se planque le gros de la journée par exemple, ça faisait plus de 10 jours qu’ils n’en avaient plus vus.

Aussi, pour les animaux les plus rares comme les lions, léopards, rhino, dès qu’ils en repèrent un, le soir, le dernier à l’avoir vu indique en fin de journée aux autres où il se situait. Le lendemain matin, ils retournent dans le dernier lieu connu et cherchent les traces, visibles le plus souvent sur les chemins empruntés par les jeeps. Les traces fraîches se retrouvent au-dessus des traces de pneus et c’est pour cela que Victor, notre pisteur a son siège à l’avant sur le capot. A partir des traces ils vont déterminer la direction prise par les lions, et on va commencer à les suivre. Sachant que les lions peuvent parcourir 15 – 20 km dans une nuit.

Tant qu’on peut suivre les traces on continue. Si on les perd, alors ils vont par radio informer les rangers de la dernière direction connue et ils vont se mettre chercher eux aussi à chercher des traces sur les pistes dans cette zone, et ainsi de suite. Petit à petit la zone de recherche se resserre et on augmente les chances de les retrouver. Mais s’ils sortent de la réserve ou s’ils évitent les chemins trop longtemps, il faudra attendre plusieurs jours avant d’avoir une chance de retrouver leurs traces.

Ce matin on a eu la chance de les trouver. On est littéralement dessus par hasard, donc pendant 20 minutes on va les suivre -seuls au monde – tandis qu’ils se déplaçent progressivement vers les buffles. Le temps d’assister à de longues séances de câlinothérapie entre les petits et leurs mamans. Au moment de repartir, Hendrick informe les autres jeeps. C’est un bon système, comme cela on observe les animaux au calme et quand on part on donne une chance aux autres de les voir.

Le lever du soleil est rouge comme le coucher du soleil, mais cela dure beaucoup moins longtemps. Le soleil monte vite et avec lui la température redevient clémente. Au surplomb d’un plan d’eau on s’arrête pour se faire une petite pause-café. L’occasion d’observer quelques hippopotames au loin et pour Noah de lier connaissance avec Hendrick et Victor en crapahutant sur la jeep.

Après avoir passé un bon bout de temps brocouille comme on dit dans le bouchonnois, Hendrick accélère subitement. Pour une fois, c’est un autre guide qui lui renvoie l’appareil et on a tôt fait d‘arriver à la hauteur d’une autre jeep. Moment toujours particulier des safaris ou les guides basculent sur un dialecte local incompréhensible ou doit se mêler un mélange de partage d’infos et de remarques sur les touristes qu’ils trimballent (enfin ils le font peut-être pas mais moi à leur place je le ferai). En tout cas l’échange est productif car ils viennent de quitter une zone où l’on y découvrira un rhinocéros noir.

Oups il est 8h20. Rien de problématique en tant que tel pour nous, mais avec tout cela le temps a filé et Tom et Marta ont un avion à prendre et doivent être à 9h au lodge et le rhino nous a passablement éloigné du lodge. Hendrick file à une allure soutenue qui ravie Noah, mais s’attardera tout de même pour prendre en photo un steenbok. J’adore ces antilopes, on dirait qu’elles viennent de sortir d’une séance de maquillage tellement elles ont les traits fins et les contours des yeux parfaitement dessinés. Puis, à un autre point d’eau on s’arrêtera pour observer notre premier crocodile qui lézarde au soleil en compagnie de quelques hippos.

Pour ceux qui veulent savoir le vainqueur d’un match éventuel entre un crocodile et un hippo, apparemment il n’y a pas de compétition. Avec une envergue de bouche de 1m30 l’hippo coupe en deux un crocodile en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Aussi s’ils se partagent sans gros problème un même point d‘eau, le crocodile veillera à se placer toujours respectueusement à distance de nos herbivores qui pour rappel ne savent pas nager et ne font que marcher au fond de l’eau.

Après un bon petit dej au lodge, il est de temps de faire nos adieux à Tom et Martha. Noah se lance dans un tam tam endiablé avant d’aller jeter un oeil à la piscine qui est glaciale.

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J’en profite pour faire non pas une « alerte enlèvement » mais une « alerte médicament ».

On a commencé à prendre de la Malarone qu’on va probablement pas tarder à abandonner vu qu’il n’y a pas de moustique (mais cela on ne pouvait pas le savoir avant d’arriver). Cela impliquait que Noah avale 2 comprimés chaque matin. Quand on voit le cirque pour une piqure on apprhéendait un peu le truc. Virginie de son propre aveu avait réussi à avaler un médoc à genre 12 ans et moi à peine mieux. Mais à l’idée pendant 18 jours de devoir écraser pour Noah le médoc dans un yahourt qui donnait un goût dégueulasse à celui-ci, je tentais pour la seconde fois de montrer à Noah comment faire pour avaler un médoc et… Shazaam !!!! Il a accepté d’essayer à nouveau et vient enfin de trouver le truc. Et cela se confirmera demain matin à nouveau puisqu’à partir de là il les avalera sans problème. Bon je ferme la parenthèse. Il n’y avait pas de moustique donc on aurait pu arrêter tout de suite de le prendre mais on a continué 3 jours de plus pour ancrer l’apprentissage d’avalage de médoc qui nous facilitera sûrement la vie plus tard. Les choix éducatifs ont ces mystères…

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Tom et Martha partis, nous nous retrouvons avec le lodge pour nous tous seuls. Mais apparemment cela ne va pas durer. Il semblerait qu’une famille de 5 français arrive. 3 enfants qui vont s’avérer être plutôt des adolescents avec une fratrie de 14, 16 et 18 ans. A leur arrivée Noah ne va cesser de vouloir aller les espionner dans une attitude mêlée de curiosité, de plaisir d’avoir de nouveaux copains et de grande timidité. Mais on le connais le loustic, passé le round d’observation il sera à nouveau comme un poisson dans l’eau et il va en effet pas tarder à faire tomber sous son charme Faustine et Amélie qui vont rapidement l’adopter.

La nouvelle famille vient de faire un tour dans le Kruger parc en solo depuis 6 jours. Bilan des courses, pas un lion, pas un léopard de vu durant cette période. Et oui, c’est un métier.

Ils ont les yeux qui brillent d’anticipation et d’inquiétude en écoutant Noah raconter sa rencontre avec un léopard et des lions. Ont-ils ratés leur chance en arrivant une journée trop tard ou est-ce le prémisse à une belle aventure ? Suspense.

Après une « trop » brève sieste sur la terrasse, il est temps de se remettre au travail. Et c’est donc avec une certaine excitation ambiante que débute notre safari de la fin de journée. Noah a pris ses aises. Il connaît tout le monde, sait comment cela se passe et prend plaisir, avec un certain ton doctoral, à expliquer aux nouveaux venus qu’on ne se lève pas dans la jeep en présence d’animaux pour éviter qu’ils nous identifient comme une proie.

Très rapidement, on retrouve notre troupe de lions qui sont – eux – encore en pleine sieste. C’est normal, en journée ils roupillent donc en les ayant repérés ce matin, il y avait peu de chance qu’ils aient beaucoup bougé depuis ce matin.

Tandis qu’une lionne semble préposée au babysitting avec tous les lionceaux, les 3 autres roupillent et ne semblent absolument pas préoccupés par le fait que nous sommes si près d’elles qu’en se baissant on pourrait leur faire une papouille sur la tête.

Puis c’est une rencontre d’éléphants qui nous attend. Nous, on en avait repéré un au loin sur la droite, très fiers. Victor avait vu les 3 grands à gauche à 15 mètres de nous derrière des arbustes. No comment.

On quitte donc la piste et Hendrick confirme ce qu’on soupçonnait depuis déjà un bout de temps, à savoir que c’est clairement le meilleur ranger de la zone. On le voyait à la façon dont les collègues qu’il croisait lui parlait, le fait qu’on était souvent les premiers à découvrir les animaux avant que les autres voitures finissent par se radiner quand il les prévenait qu’on allait partir. Et puis avant d’être ranger il était chargé pendant 3 ans et demi de patrouiller dans le Kruger pour intercepter les braconniers. C’est un signe.

Là, à sa façon d’approcher les 2 mâles et de s’arrêter à même pas 3 mètres d’eux, puis de couper le contact alors que le 3ème mâle faisait mine de vouloir continuer tout droit pour rejoindre le groupe alors qu’on était sur son chemin, on voit qu’il maîtrise. A moins qu’il soit inconscient ? Non, lui, il maîtrise. Les animaux restent calmes et ce mâle finira par faire le tour du véhicule.

Le lendemain, dans une situation analogue, et alors qu’on a observé un mâle à une distance équivalente, le ranger suivant qui s’est approché pour faire de même après notre départ a du réaccélérer en catastrophe devant l’éléphant qui commençait à menacer de charger.

Après avoir vu nos premiers zèbres (et oui seulement maintenant car on n’est pas dans une zone de plaine), on arrive en haut d’un petit promontoire rocheux pour observer le coucher du soleil avec un Coca pour Noah, une Ginger ale pour Virginie et un Chardonnay pour moi. Il y a pire comme fin de journée.

Sur le retour, dans la nuit noire, et à l’aide d’un projecteur que Victor utilise pour balayer de droite à gauche la piste, on finira par retrouver nos lionnes qui vont pas tarder à se mettre en route. Juste derrière un bush baby, l’un des plus petits primate du secteur que ses grands yeux rouge proportionnellement à son corps a mis en évidence malgré la nuit noire.

Au dîner, Noah a définitivement été adopté par la famille des 3 adolescents. On se couche tôt. Une nouvelle journée de safari nous attend demain.

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