Je préfère l’annoncer tout de go, malgré les appels du pied répétés de Virginie pour que je continue à alimenter notre blog, j’ai fermement l’intention de me mettre « en vacances » le temps que l’on reprenne officiellement notre périple, et ce pour la principale raison que je ne voudrais pas finir par poster faute d’inspiration, des photos d’un chat faisant la grimace, vous raconter ce que j’ai mangé ce matin au petit déjeuner, ou détailler sur 3 pages notre partie de Molky où Virginie nous a encore battu sur le fil il n’y a pas 15 minutes.
J’ai passé ces 15 dernières années à décrier cette mode planétaire qui consiste à raconter sur internet des trucs totalement inintéressants devant des followers ébahis, ou d’asséner des vérités sur des sujets sur lesquels on ne connait rien et n’avons aucune espèce de légitimité. Je ne vais donc pas commencer à le faire moi-même aujourd’hui sous le seul prétexte qu’après avoir été 3 mois sans domicile fixe, nous voici pour une durée indéterminée sans job fixe et donc avec beaucoup trop de temps libre.
Néanmoins, hier soir, notre cher Président – dont l’allocution a savamment débuté à 20h02 pour ne pas voler la vedette à 20h à la célébration de notre corps médical – s’est exprimé devant 39 millions de français avides de connaître le choix de la date – de déco finement (contrepèterie vieille comme le monde) et a subtilement glissé entre deux phrases que les frontières de l’espace Shenghen n’étaient pas prêtes de se rouvrir.
Ceci engendrant par voie de conséquence un futur « très » long silence de ma part sur ce blog, je me sens obligé de reprendre la plume une dernière fois avant de me mettre en congé sabbatique. Aucun risque du syndrome de la page blanche, je me suis rappelé que pour toute une série de bonnes raisons que vous comprendrez très bientôt, comme nos chers gouvernants, on ne vous avait pas tout dit.
A l’heure ou chacun fait de longues tribunes prophétiques et / ou philosophiques sur le coronavirus pour exister médiatiquement avec des titres aussi pompeux que : « il y aura un avant et un après Coronavirus » ; « Repensons un nouveau modèle de société » ; « C’est la faute à la mondialisation » ; « Plus grande crise depuis la grande dépression », « manger 2 citrons avec la peau en sautillant sur une table peut vous protéger du Coronavirus », je vais vous raconter sous forme d’hyperbole ce que nous avons vécu en voyage, afin de vous éclairer en même temps sur ce grand défi que le Coronavirus pose à notre civilisation.
Je me rends bien compte qu’en lâchant les idées de titres du billet « finalement censuré à l’époque », je vais gâcher l’effet de surprise, mais il faut bien commencer par quelque chose. Alors les voici.
« Un billet qui gratte » ; « Sauve qui poux »
Tout a commencé en février dans cette merveilleuse ville de Rio, lorsque notre petit espiègle de Noah a commencé à se gratter la tête un petit peu trop à mon goût. Je me suis permis une remarque auprès de Virginie qui m’avait alors rembarré d’un ton doctoral répliquant que si Noah se grattait, c’était à cause de ce savant mélange de chaleur et d’humidité du climat brésilien et rien d‘autre. Le cheveu « bouclé » est une matière vivante que seuls ceux qui l’ont sur la tête peuvent appréhender à sa juste mesure. J’avoue avoir battu en retraite de peur. On ne s’attaque pas aux sacro-saints cheveux de Virginie et de l’enfant impunément.
Néanmoins, c’était sans compter mon obstination et le fait que je pense quand même avoir toujours raison. Du coup, je me suis permis de revenir une deuxième fois à la charge 2 jours après, puis une troisième fois à notre arrivée à Fortim. Et celle-ci fut « malheureusement » la bonne (parfois ca fait chier d’avoir raison). Notre petit ange, la prunelle de nos yeux, qui a évité tous les poux à l’école pendant 1 an malgré de nombreux épisodes d’infestation Montessoriens, n’a pas échappé aux poux brésiliens. Approchez-vous, regardez, il y en a un entre les doigts de Virginie qui se débat vigoureusement (et oui l’effroi fait ressortir mes origines marseillaise ce qui rend le poux encore plus effrayant).
Mais où a-t-il bien pu attraper des poux ? Sur le papier on s’en fout un peu de savoir où, mais comme il y a une volonté inexpugnable de vouloir toujours trouver le Patient 0 et que j’ai souhaité faire un corollaire avec le Coronavirus, prêtons nous au jeu. D’abord, un terreau favorable sans aucun doute. Notre marché d’animaux vivants chinois à nous, c’est d’avoir un enfant à la chevelure si particulière que personne sur la planète sans distinction de race, sexe, âge ou religion, ne semble pouvoir s’empêcher de lui passer la main dans les cheveux pour lui faire des gratouilles. Notre Pangolin ? Probablement le serre-tête chat – licorne acheté dans la rue pour le Carnaval de Rio et qu’il a porté avec un tel bonheur et fierté, que malgré la suite de l’histoire, on ne pourra pas regretter de lui avoir offert.
Toujours est-il que nous venons de quitter Rio pour une journée marathon. Rappelez-vous. Réveil à 4h du matin pour prendre le vol de 6h15 pour Sao Paulo. 3h d’attente à l’aéroport de Rio suite à l’annulation de dernière minute de notre vol. Puis nouveau vol, mais cette fois à destination de l’autre aéroport de Sao Paulo, distant d’1h30 en voiture de l’aéroport d’où partait notre correspondance pour Fortaleza. Correspondance désormais foirée, qui nous poussera à séjourner 3h dans un hôtel international près de l’aéroport avant de prendre en fin de journée un nouvel avion, puis 2h de route Avec un chauffeur pour arriver à Fortim à plus de minuit.
A 9h le lendemain matin, au réveil, l’enfant se gratte, Virginie regarde, le verdict tombe. It’s a catas’poux’trophe. Le mal est fait, et bien installé.
Nous nous rendons compte que bien involontairement, malgré une pré-alerte du Dr Xao Bartoli balayée d’un revers de main par un dirigeant autoritaire communiste (Virginie), notre patient presqu’asymptomatique vient de contaminer en 12h les 4 plus grands aéroports du Brésil (Rio, les 2 aéroports de Sao Paulo et celui de Fortaleza), un hôtel de standing international ou se déroulait un énorme congrès (partagé le buffet avec eux) et 3 bougres, victimes de l’uberisation qui nous ont transporté bien involontairement durant cette journée.
De la à dire que nous venons de lancer une pandémie à travers toute la planète, la comparaison est osée, mais l’on devine aisément la propagation du Coronavirus.
En plus demain, on part en buggy pour 8 jours dans le Nordeste, et là, jamais on ne trouvera une pharmacie pour tenter d’endiguer l’épidémie.
Mais la comparaison avec la Chine ne s’arrête pas là car je ne sais pas si vous avez mesuré la gravité de la situation à ce stade du récit, mais nous sommes devant une véritable poudrière.
Analysons froidement les faits comme a du le faire l’OMS. L’enfant se gratte depuis 3 jours minimum. Comme souvent depuis le début de notre voyage, il a soit dormi dans notre lit, soit nous a rejoint dans la nuit. Il a gesticulé, nous a fichu des coups, le tout, à côté d’une bombe ambulante, vous l’aurez compris, Virginie (je ne parle pas au sens physique du terme même si ma femme est très jolie, mais à ce que représente sa chevelure pour le Poux). Si un seul poux a la mauvaise idée d’élire domicile sur la tête de bouclette, aucun traitement ne viendra à bout de cet enfer. Il faudra la tondre comme au moyen-âge. Et c’est peut-être déjà le cas en plus, car si la seule évocation du coronavirus fait tousser, celle des poux fait se gratter inévitablement la tête et c’est précisément ce qu’est entrain de faire Virginie. Pënsez-y un peu. Voila, je suis certain que vous aussi vous avez commencé à vous gratter.
Je mesure alors la difficulté des Chinois de Wuhan. Comment traiter le Coronavirus quand on est assis sur une poudrière (on a déjà envoyé des dizaines de milliers de touristes chinois infectés partout sur la planète) et qu’on se rend compte qu’on sera ostracisé instantanément si on dit ce qu’on a découvert à ceux qui nous cottoient.
Bref, on a pris le poux par les cornes et 1h après sa découverte, un taxi nous emmenait dans la petite pharmacie du bourg de Fortim et à coups de Google trad, nous avons fini par nous faire comprendre et à repartir avec des produits pour traiter toute la famille.
Toujours est-il qu’à partir de là, si vous constatez dans nos récits tous les 4-5 jours des trous dans notre agenda pourtant scrupuleusement décrit sur ce blog, c’est probablement que la censure chinoise opérait et que nous étions pendant 2-3 heures à lutter contre cet ennemi pas si visible que ça à coups de shampoings et autres produits.
Et bien on peut vous dire que se débarrasser de ce truc sans le refiler aux prochains quand on change d’hôtel tous les jours ou tous les 2 jours est une sacrée gageure quand tu ne peux pas laver tes fringues et que tout repart à chaque fois dans les sacs. Il y a toujours un « fucking egg » qui passe au travers des mailles et qui relance l’infestation quelques jours plus tard.
Durant ces grands moments de solitude, Nous en sommes venus à concevoir des stratégies dignes de la paranoïa observée dans le cadre du Coronavirus – comme quoi quand on est désespéré, plus rien ne devient idiot -. On a ainsi un temps volontairement décidé de me « sacrifier ». En effet, si Virginie avait des poux, c’était foutu. Mais si en traitant Noah les poux se barraient et élisaient domicile chez Virginie ? Il a ainsi été décidé un temps qu’à défaut de « gestes barrières » je serai « la barrière ». Si quelqu’un d’autre que Noah en chopait, autant que ce soit moi, dont les cheveux seraient plus faciles à traiter et le poux plus facile à voir (et puis moi, pour le shampoings et le traitement, je ne me ballade pas à poil en faisant l’andouille ou en pleurnichant parce que ca m’agace ou que ca pique les yeux, hein Noah ?). Du coup, on traitait Noah, Virginie se badigeonnait de vinaigre et de lavande pour se rendre aussi peu attirante que possible, et moi je restai « vierge » de traitement.
Bref, cette petite blague refluait et revenait comme la marée et nous voyions arriver avec une certaine inquiétude notre départ du Brésil, synonyme de grande réunion familiale avec les mamans, la sœurette, la petite Zoé, sans s’être débarrassé du problème.
Que faire ? Tout en maintenant une double approche traitement et prévention, il fut décidé deux stratégies qui se sont avérées salvatrices.
Tout d’abord, Informer de manière ciblée plutôt que de passer au 20h. On laissa donc de côté le FMI et l’OMS parce qu’après on aurait été mis sous tutelle par des gens qui n’en connaissent pas plus que toi mais qui auraient été ravis de t’imposer leur point de vue et prodiguer leurs nombreux conseils. On décida donc pour le bien collectif de ne pas en parler aux mamans, mais de le dire à Jennifer. D’où le fait que nous ayons du passer sous silence sur le blog nos aventures avec nos amis les bêtes du cuir chevelu.
Ensuite, on décida de passer au traitement de choc. Après tout, on était en Amérique, et en tant qu’européens nous avons un siècle de tradition tenace de faire appel à nos amis d’outre atlantique pour régler nos problèmes. Avec Jennifer on passa donc à la pharmacie américaine. Fini le traitement de Brésilien au mojito qui faisait marrer les poux. On est passé au traitement US avec le Napalm, les missiles balistiques, l’option nucléaire toujours ouverte.
Je me revois avec Jennifer trouver une solution pour aller tous les deux chez Walgreens, puis ne pas trouver de produits dans le rayon et finir par aller demander à la pharmacienne derrière son comptoir si elle avait des produits anti-poux. J’aurai sorti un fusil pour la braquer, on lui aurait probablement fait moins peur. La nana au seul nom de poux a fait un bon en arrière d’un mètre avant d’indiquer fébrilement du doigt le rayon où on pourrait en trouver. Avec Jenn on s’est même senti de préciser que ce n’était pas pour nous, mais trop tard, on était jugés, condamnés, bannis. Pire qu’un gars avec un nom italien, présentant un passeport français en venant des US en période de coronavirus (ah ben tiens, merde, c’est nous ça !)
Une fois arrivé au bon rayon, on a ensuite choisi le kit « Intégral » avec la bombe pour traiter textile et surface, le shampoing, l’après-shampoing, le démêlant anesthésiant et le peigne dragueur de mines, le tout avec un nombre de symboles indiquant que le produit était tellement fort et toxique qu’il y avait un disclaimers disant qu’on allait probablement mourir en même temps que les poux en utilisant le moindre de ces produits, mais que s’ils ne pouvaient pas se porter garant de notre santé, les poux, eux, disparaîtraient, ce qui pour la société restait le but principal.
A partir de là, on a envoyé la sauce à intervalle régulier (si je peux me permettre cette expression), ce qui n’était pas si facile car on a du partager la salle de bain avec maman 4 nuits d’affilée, et nous avons fini après presque 1 mois de traitement à pouvoir définitivement affirmer que les poux sont de l’histoire ancienne.
Quelle morale tirer de cette histoire face au Coronavirus ? C’était quand même l’objectif de ce billet à l’origine je vous rappelle.
1° Si de l’avis de tous ceux qui ont eu des poux, depuis 100 000 ans qu’on connait ces bestioles, on arrive péniblement à s’en débarrasser qu’après 1 mois à chaque fois, on peut se dire qu’on n’est pas si bien armés contre le coronavirus et que si on s’en débarrasse en seulement deux mois de confinement, c’est vraiment pas cher payé.
2° Heureusement pour nous que les américains en prennent aussi plein la figure, parce que comme d’habitude, si ca doit se résoudre, ca va se résoudre par eux. Donc plus ils sont dans la merde, plus ils s’y mettront pour régler le problème, et plus vite on aura de chance d’avoir un vaccin ou un traitement pour repartir en voyage tranquillou.
Je voudrais finir sur une note de légereté après cet épisode ô combien dramatique de notre voyage pour vous proposer ce qui ne devrait pas tarder à rentrer au panthéon des maximes populaires :
« les bouclettes, c’est chou, mais quand tu as des poux, c’est chiant »
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