On se réveille au Koahla lodge. On a plutôt bien dormi, modulo mon bras qui m’a fait douiller une bonne partie de la nuit.
Le programme du jour n’est pas totalement arrêté mais l’idée c’est à minima de faire le Polulu trail. On a essuyé une petite averse ce matin tôt et le temps est changeant. On décide donc de prendre notre temps – pour une fois – en petit déjeunant dans notre maison et en se prélassant un peu sur la terrasse dont la vue sur l’océan est magnifique.
On partira ainsi finalement vers 10h et quelques à la faveur d’une éclaircie et après avoir discuté avec les propriétaires qui sont venus nous dire bonjour. Ils se sont installé ici il y a 15 ans er n’ont plus jamais bougé. Ils louent en fait juste cette maison et vivent dans la maison d’à côté.
On est dans le coin des Cow boys ici. Au sens littéral car ils vivent beaucoup du bétail des environs. Très peu de touristes car très peu d’hébergement. Une communauté qui vit un peu en dehors de la vie de l’ile même si on est en réalité qu’à 40 minutes d’un centre plus urbain. D’ailleurs c’estv le seul endroit ou les masques étaient obligatoires pour rentrer dans le supermarché, preuve que le brassage est moins fort ici.
Le Polulu trail est apparemment un petit bijou de rando. Pour l’atteindre, on emprunte la seule route qui oblique vers le nord-est de l’ile avant de se terminer en dead end. Au-delà, 25 km de côtes inaccessibles autrement que à pied en passant d’un ridge à l’autre.
Sur le chemin vers le trail on repère en voiture un petit endroit coloré avec des tables sur l’herbe qui a l’air de proposer des jus de fruit et qui pourrait bien être notre stop du déjeuner pour se récompenser de la rando.
Arrivés au bout de la route, on distingue un Lookout qui surplombe la plage de Polulu. On retrouve un classique des iles de Hawaii. Un simili parking de 5 voitures maximum, et après c’est Joe la débrouille pour réussir à se garer le long d’une route sinueuse au risque de devoir repartir sans jamais avoir pu visiter le lieu pour lequel on est pourtant venu.
Le départ de la rando se fait au niveau du Lookout. Là un Hawaiien s’approche et s’emploie assez longuement à te dissuader d’à peu près toute velléités de randonnées ici. Le chemin qui descend en pente abrupte vers la plage de Polulu en contrebas est particulièrement boueux et glissant. Il longe la falaise et de nombreuses personnes sont mortes en tombant de la falaise. Il y aussi de nombreux blessés qui se tordent la cheville et il faut les hélitreuiller ce qui est très compliqué. Comme il voit bien – excusez-moi de l’expression – que ça m’en touche une sans faire bouger l’autre – il jette un coup d’œil sur Noah et joue la fibre du mauvais parent qui envoie son enfant à une mort certaine.
Il conclut en nous disant que si malgré cela on est assez inconscient pour vouloir descendre, 150 mètres en contrebas d’ici, au niveau de la plage, se situait un village avant que celui-ci ne soit détruit par un raz de marée. Des rubalises ont été placés pour nous interdire l’accès au site qui est sacré pour eux. Si on pouvait le respecter…
On comprend également que la majeure partie des gens s’arrêtent au niveau de la plage, mais qu’il est possible de poursuivre à pied et de franchir 2 ridges de plus à l’est, mais là aussi, à nos risques et périls bien sûr, car au-delà de la plage de Polulu le sentier n’est même plus entretenu.
Les proprios nous avaient prévenus qu’on aurait droit à ce type de discours. La descente par temps de pluie peut-être en effet un peu dangereuse, mais la raison réelle est que ça gonfle les locaux de voir des touristes descendre sur la plage.
Au final, la seule vraie info que je gagne de cette discussion, c’est comment le temps évolue ici. En effet à environ 1 km au large, un rideau de pluie ne cesse de s’abattre depuis une bonne demi-heure et je comprends que c’est sans problème car les nuages vont contourner l’ile et repiquer sur la terre quelques kilomètres plus à l’ouest. En revanche, il me montre une petite ile et une falaise à 3 km à l’est. Quand ça pleut là, tu as 15 minutes max avant que le déluge ne s’abatte sur toi à Polulu.
Après avoir – pour changer – oublié un énième truc dans la voiture qu’on avait garé à 200 mètres, on se met enfin en route. « Elle est où maman ? » « Partie chercher un truc dans la voiture » « Pffff » « En même temps la connaissant c’est un truc pour toi genre le casse-croute ou de l’eau alors…. ».
DU coup pour patienter, je regarde nos panneaux avertisseurs habituels situés en début de chaque rando. Voyons voir, de quoi allons-nous mourir ici ? Un panneau montrant la chute d’une falaise, un autre ou on est écrasés par des rochers, un dernier ou on se noie sur la plage à cause des flash floods. Ce qui ne serait vraiment pas de chance, c’est qu’un rocher nous tombe dessus, nous précipite du haut de la falaise et qu’on se noie ensuite.
Trêve de plaisanterie, c’est vrai qu’ici tu es tout de suite à flanc de falaise, sur terrain boueux, donc je veux bien croire que si tu es un américain obèse (40% de la population actuellement) ca peut vite mal tourner, mais bon, il ne faut pas exagérer non plus quand même. On a fait bien bien pire.
On attaque donc notre descente vers Polulu. Effectivement ça chute sec. En 15 minutes on est arrivé au bas et en effet il y a un endroit où il ne vaut mieux pas rater son virage, mais à part cela, rien de bien méchant.
En bas, on découvre qu’il y a une grande rivière qui passe à travers la végétation et se jette au niveau de la plage dans la mer qu’on ne voyait pas d’en haut. Cela créé un espace frais et ombragé bien agréable dans lequel on se balade avant de rejoindre la plage où Noah entame rapidement une construction en bois flotté.
Au niveau de la baignade en revanche c’est clair, vu les rouleaux, ce serait une très mauvaise idée. Je me demande qui pourrait être assez couillon pour y aller volontairement même sans avoir vu les panneaux d’avertissement. Ah ben si, un couillon re ricain qui voulait faire le beau devant sa nana. Il a été roulé dans la vague et ressort maintenant tout penaud comme un burito détrempé.
Noah ayant élu domicile à l’ombre sous les pins et refusant clairement de se déplacer ne serait-ce que de 10 mètres supplémentaires parce qu’il envisage de faire des routes pour son quad, Virginie m’encourage à aller jeter un coup d’œil au bout de la plage histoire qu’au moins un de nous deux ne soit pas cloué là.Je m’exécute d’autant plus volontiers qu’au loin j’aperçois une magnifique jeune fille que je passe bien sûr sans regarder – 22 ans de vie commune quand même -.
Au bout de la plage, j’aperçois un chemin qui s’enfonce dans la forêt et mène visiblement au prochain ridge. Je décide d’en parcourir un petit bout pour voir si le chemin est vraiment si mal entretenu ou si on peut y aller avec Noah. Car le truc avec les ridges, c’est que ça monte très fort, très vite, et qu’ensuite bien sûr ça redescendra tout pareil sur le retour.
Au début, c’est très facile – beaucoup plus que le chemin qu’on a pris pour descendre vers la plage de Polulu- et comme souvent dans ces cas-là, en quelques minutes j’ai l’impression d’avoir déjà avalé la moitié de la hauteur du ridge.
J’ai beau savoir que les hauteurs en rando c’est très trompeur, je me dis que n’étant pas loin du sommet, et comme il n’y a pas de couverture réseau pour prévenir Virginie, plutôt que de redescendre maintenant, je n’ai qu’à monter jusqu’en haut en courant pour voir si ça vaut le coup. Je ne m’absenterai ainsi pas longtemps.
Et en effet, le chemin est très facile, mais beaucoup plus long que ce que je pensais. A chaque nouveau virage je suis partagé entre faire demi-tour ou continuer encore un peu vu que je dois presqu’être au sommet.
Arrivé au sommet après 20 minutes à courir plus qu’à marcher, je me retrouve en pleine jungle et pas la moindre visibilité sur l’océan. Mon GPS me montre qu’il faut probablement continuer un peu pour avoir un point de vue. Et hop 5 minutes de plus au compteur.
Arrivé au Honokane nui lookout j’ai enfin une vue sur la vallée. C’est beau, mais honnêtement, ça ne vaut clairement pas le coup d’amener toute la petite famille là. Vu que je suis parti depuis 30 minutes en disant à Virginie que je revenais dans 5 minutes, me voilà à courir dans l’autre sens pour qu’ils ne s’inquiètent pas trop, sauf que passé la partie plate, impossible de redescendre en courant dans la boue à moins de vouloir rater un virage et de finir dans les rochers en contrebas. Manquerait plus que je donne raison à l’hawaiien du début de la rando sur les risques de cette randonnée, il emmerderait tous les autres touristes en citant mon cas.
Je retrouve donc les 2 loulous plutôt une bonne heure après être parti. Virginie pas inquiète du tout. Confiance, insouciance ou inconscience, mon cœur balance… Elle a quand même réussi à faire migrer Noah de 15 mètres. Noah a créé un véritable réseau autoroutier digne des échangeurs de Los Angeles.
On peine – pour changer – à sortir Noah de son terrain de jeu, mais les nuages s’approchent dangereusement de l’ile que le garde m’avait indiqué comme zone à risques. Je lève donc la voix, entend notre pré-ado râler avant de s’exécuter de mauvaise grâce.
Alors qu’on quitte la plage de Polulu et que j’essaye de le prendre en photo devant les nuages noirs qui s‘amoncèlent au-dessus de notre tête, il refuse que je le prenne en photo au motif que si je lui ai demandé de partir si vit, ce n’était certainement pas pour s’arrêter maintenant pour prendre une photo. En même temps c’est logique…
Sur la montée, on croise des touristes en mode tongs alors qu’une pluie tropicale vient de s’abattre sur l’ile au loin. Il nous reste donc 15 minutes max. Et en effet tandis que nos touristes du dimanche vont se prendre la pluie torrentielle sur la descente – good luck with that -, nous on a juste le temps de mettre les k-ways et de se faire saucer sur le dernier tiers de la montée, puis les 200 mètres d’asphalte où on avait fini par réussir à garer la voiture sur le bas-côté.
Le temps de se sécher dans la voiture et de reprendre la route, il fait à nouveau soleil quand on arrive au Fresh Off the grid café qu’on avait repéré en bord de route en venant. Le principe, un food truck, des tables pique-nique et un certain goût pour faire des petits points de couleur un peu partout avec la végétation du coin.
1h à se régaler avec les smoothies et les différents plats et assiette de fruits. Je me délecte à entendre les petits vieux du coin (dont le cousin tient le restau) à la table d’à côté avec 2 touristes américains gnans gnans se confondre en politesse que des gens du coin acceptent de leur adresser à la parole à eux, les urbains. Les petits vieux sont aux anges. C’est quand même plus sympa qu’une maison de retraite..
Quand on reprend la route, on se rend compte que mine de rien il est déjà 16h.
On fait un stop à Keokea Beach où Noah va se baigner vite fait dans une anse un peu à l’abri des grosses vagues, puis on rentre profiter de notre ranch.
Pendant qu’on profite du ranch, Noah s’offre une séance dessin sur la terrasse.
Virginie, elle, se met aux fourneaux – très jolis d’ailleurs – pour notre deuxième repas sain de la semaine.
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